Manu chez les bourgeois-La main du diable

    La Harley remonte la rue de pavillons bourgeois ; tous sur le même modèle, dans le style luxueux. Des hommes sont dans leur jardin à bichonner leur voiture ou à préparer le barbecue du week-end prochain. Les motos de ce type ne sont pas courante dans le quartier ; trop bruyantes et trop mauvais genre…

Manu regarde encore une fois l’adresse sur la carte de visite ; c’est la prochaine coté pair. Le motard sonne à la porte colossale, un peu intimidé. La porte est ouverte par une gamine ; une femme en miniature plutôt ; quinze ans au plus.

-« Bonjour, vous désirez ?... dit elle avec un sourire enjôleur ; puis reconnaissant le visage, Manuuuu ! Comment tu vas ? Rentre, ma daronne* est là… » Elle est familière comme s’ils

*parents, gens plus âgés dans la langue étrange des adolescents

s’étaient toujours connus ou qu’ils avaient gardé les vaches ensemble ; sauf que dans l’Europe de 2012, on ne garde plus les vaches…« Maman, Manu est venu nous voir !... Tiens, assied toi là, elle arrive…» Le jeune homme se met sur un canapé cossu assez vaste pour tailler les perfectos de toute sa bande de bikers ; le luxe, le confort, il apprécie pas mal. Le motard comprend même pourquoi Patricia s’est détaché de lui : il ne pouvait pas lui offrir un intérieur comme ça…Partout des objets choisis, qui allaient avec l’ensemble ; de l’argent, mais la patte d’une femme aussi…

Brigitte entra rapidement avec un sourire las.

-« Bonjour, Caro vous a fait rentrer, c’est bien ; mais veuillez excuser son langage : on est tous ses potes, ou ses ennemis, c’est selon… Elle lui tend une main qu’il sert un peu trop fort.

-Pardon…Vous m’aviez dit de passer quand je serais sorti…

-Bien sur, j’espérais bien que vous viendriez ; ça va mieux ?

-Bien ; merci encore pour tout ; la moto démarre mieux qu’avant…les harleys, c’est toujours un peu capricieux… comme les femmes !...

-Ha ha ; vous avez trouvé facilement ? Vous voulez…une bière ?...

-Avec plaisir ! Oui, j’ai facilement trouvé bien que je ne connaisse personne à Chantilly.

-Il y a longtemps que vous connaissez cette…Patricia ? Elle avait d’autres noms d’oiseaux qui lui venaient à la bouche. C’est la bière de mon mari, quand il reçoit ses copains le vendredi soir.

-Ca sera très bien merci… On s’est rencontré il y a presque dix ans ; on n’oublie pas une femme comme elle et on remercie chaque instant que l’on a passé à ses côtés. Brigitte devient encore plus jalouse d’une femme qui puisse provoquer de tels sentiments uniquement par sa présence. La bourgeoise a l’impression de n’exister aux yeux de son mari que par le nombre d’actions dans l’entreprise qu’elle représente.

-Je pense qu’elle vous reviendra, quand elle verra combien vous tenez vraiment à elle, et pour elle-même : et comme ça, cette salope lâchera un peu les maris des autres !... Caro descend l’escalier à ce moment, bruyamment comme à son habitude.

-Manu, tu me feras faire un tour du quartier derrière toi, avec ta bécane ?... Les bourgeois promenant leurs chiens, vont être malades !...

-Caro, laisse le monsieur boire calmement sa bière, nous discutions avant que tu nous coupes…

-Ce n’est pas grave, madame Vittel, je ne vais pas m’attarder de toute façon ; je suis très heureux d’avoir fait votre connaissance, et j’espère que votre mari rentrera bientôt …de voyage !

-Oui, pareil pour votre copine… Le jeune homme se lève, sans avoir fini sa bière, je lui fais faire juste un tour du pâté de maisons, madame Vittel ? On essayera de ne pas trop renverser les poubelles… » Rajoute-t-il avec un clin d’œil à l’attention de Brigitte.

Un gentil garçon ! pense-t-elle et plus mignon que Gaspard ne l’a jamais été…

Quand Mike rentrera chez lui à Ivry, il prendra un autre chemin qu’à l’aller ; le motard n’a pas envie de longer l’hippodrome.



21/05/2013
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