Se travestir pour s'amuser - Le feu sous la glace

« Vous en avez besoin pour quand ? J’ai ces deux costumes de chevaliers-là et cet ensemble avec le hennin ; mais j’ai l’authentique armure du roi Arthur qui doit rentrer dans deux jours ! Ah ah… » Émilie prend son travail vraiment à cœur ; le couple d’Anglais qui vient de lui dévaliser son rayon Moyen Âge est vraiment charmant, mis à part que ce sont deux beaux gars… Encore des somptueux mecs qui ne sont plus sur le marché : on ne revient pas de l’homosexualité ; notre éducation nous prépare à une vie avec une descendance issue de deux parents de sexes différents, et quand notre attirance se tourne vers un partenaire de notre genre, c’est pour la vie. Ils vont se faire une petite soirée privée comme seuls les lieux à la mode en ont le secret : un mélange de champagne et juste assez de cocaïne pour se vider la tête en se remplissant la narine…

La jeune femme, malgré sa plastique remarquable, travaille dans un commerce autour de la fête, au service des animations : elle voit les gens venir choisir les vêtements pour leurs nuits parfois sages mais souvent débridées ; et puis, quand ils reviennent deux jours après, avec les costumes sous le bras, les traces et les stigmates des bacchanales sont encore visibles.

Ceux là ont l’air sage ; un gentil couple qui va retrouver un petit groupe d’amis, mais pas de trucs trop extravagants en vue, pense Émilie. Le britannique qui choisit a une idée assez précise de ce qu’il veut. La côte de maille, ça c’est incontournable, mais les armoiries de croisés sur la tunique, ce n’est pas possible : Harry descend d’une très vieille famille anglaise qui a subi la grande humiliation du temps de Guillaume le Conquérant. L’aversion des Français en armure est congénitale. Passer quelques jours au ski près de la frontière suisse soit, mais pas plus…

« On en sait plus sur les disparitions, mademoiselle ? » L’ensemble des jeunes hommes présents dans la région de Courchevel est interpellé et inquiet. Steven, son ami, est un mâle magnifique au torse plat ; l’anglophone au français impeccable a peur que son partenaire soit le suivant sur la liste. L’armure et les armes de bois sont un message subliminal envers les kidnappeurs.

- La gendarmerie locale a interrogé tout le monde dans la ville mais on soupçonne une troisième disparition ; ce que je vous dis provient du journal, mais rien ne permet d’affirmer qu’il leur est arrivé malheur. »

Émilie voudrait préciser pour les rassurer que l’orientation sexuelle du joli couple que forme Steven et Harry constitue une garantie contre un enlèvement, mais elle s’abstient : ça, ce n’est pas dans la presse…

- Tant mieux ; de toutes façons, nous avons cette soirée et puis nous repartirons demain dans l’après-midi, après avoir ramené les costumes bien sûr ! À propos, puisqu’il y a si peu de tissu, ce n’est pas la peine de les faire nettoyer ?

- Ah non, surtout pas ! Un peu de dégrippant sur les côtes de maille peut-être… Ah ah »

La vendeuse et l’anglais partent de l’éclat de rire frais que leur permet leur jeune âge ; encore plus net qu’il n’y a pas entre eux deux la moindre ambiguïté concernant la drague. C’est mieux et c’est rare ! Habituellement, les clients la trouvent trop réservée, alors que leurs femmes ont des mitraillettes dans le regard devant la mine sexy et sans doute faussement ingénue d’Émilie. Il n’y a que Djamel finalement avec qui cela s’est passé sans faux semblants ; pourtant, il ne semble visiblement pas du tout intéressé par des gens comme Harry ou Steven. Il semble avoir une pudeur et un respect de l’autre ; à moins qu’il ait connu une rupture douloureuse dans sa vie. Les deux sont bien sûr aussi tout à fait envisageables…   



22/04/2013
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